Le républicanisme s’oppose à l’arbitraire politique et au cléricalisme religieux (confusion entre la rationalité et la croyance). Le cléricalisme détourne le citoyen de sa propre raison (cf. Henri Pena-Ruiz, Dieu et Marianne).
Dans sa version moderne, le républicanisme s’est fondé sur la nation. Le républicanisme est devenu le discours d’action de référence permettant d’associer deux choses : d’une part les libérations populaires nationales et de l’autre la construction de l’action rationnelle collective par le biais de l’État. Le Printemps des peuples regroupe une série d’insurrections à travers l’Europe. Il y a un essor du patriotisme républicain (Jules Michelet et Edgar Quinet). Giuseppe Mazzini fonde, dans un même esprit, l’éphémère république romaine. George Sand lui fait rencontrer Pierre Leroux. Giuseppe Mazzini écrit Les pensées sur la démocratie en Europe et se prononce pour les États-Unis d’Europe. On aurait alors une double respublica : respublica naturelle (patrie) et respublica secondaire (Europe).
Le républicanisme estime que la nation permet l’individualité, et vice-versa. Le républicanisme revendique donc d’être à la fois un individualisme et un holisme. Ce qui permet cela, c’est notamment l’action de l’État qui va révéler la spécificité de l’individu dans l’éducation et l’individu va ensuite se mettre au service de l’État car pendant l’éducation, on inculque une morale républicaine, une morale civique. Cette morale indique à l’individu quels sont ses droits et ses devoirs vis-à-vis de l’État. Ceci n’est pas sans rappeler la philosophie de Kant qui montre la tension entre l’individualité et l’humanité. Nous faisons l’expérience du devoir en dépit de nos intérêts particuliers, nous devons nous montrer capable de satisfaire aux intérêts de l’humanité. Le remord lorsque nous agissons contre les intérêts de l’humanité est la preuve que l’homme a une destination morale. Nous éprouvons une double-appartenance permanente. L’individu peut suivre sa logique mais il est redevable à la nation. Des philosophes kantiens ont œuvré en France à la République : Charles Renouvier, Manuel républicain de l’homme et du citoyen, Science de la morale, Jules Barni, La morale dans la démocratie, Ferdinand Buisson, théoricien du laïcisme. Nous sommes face à un rapport entre trois niveaux : individu, nation, État.
La constitution de l’Etat républicain : en 1871 et 1882, sont votées les lois sur l’instruction publique de Jules ferry qui la décrètent laïque et obligatoire. En 1905, est votée la loi sur la séparation entre l’Église et l’État. Le sociologue et philosophe Célestin Bouglé (1870-1940) contribue à se représenter l’institution étatique comme vectrice d’un service public. Les droits ne sont réels que s’il y a une réalité sociale derrière.
- Droits à la sécurité (police et armée) relèvent d’une définition hobbésienne de la République.
- Droits à la santé (sécurité sociale).
- Droits à des conditions de travail décentes.
- Droit à l’information (PTT et mise en œuvre des grands media nationaux ; France Télévision et Radio France sont dites libres car soustraites aux influences mercantiles).
Le républicanisme semble ne pas être une pensée absolument socialiste du fait qu’elle reste individualiste. Le républicanisme joue pourtant de l’ambiguïté du socialisme, lequel a toujours souffert de sa proximité avec le marxisme. L’origine du socialisme ramène le socialisme vers quelque chose qui est plutôt individualiste. Jaurès (1859-1914) : «Le socialisme est l’individualisme logique et complet». Il existe une connivence étrange entre le républicanisme et le socialisme. Jean-Fabien Spitz, Le moment républicain en France. Dans le chapitre 1 intitulé «Le crépuscule de la république», Spitz souligne l’absence d’opposition entre individualisme et républicanisme (cf. pp. 39-45 et 51-59). L’intérêt général, c’est l’égalité des citoyens. La reconstitution du républicanisme a été rendue active par le radicalisme. Alain (de son vrai nom Émile Chartier, 1868-1951), a écrit un certain nombre d’articles de journaux, tribunes politiques (cf. les différents Propos… dont certains sont téléchargeables ici : http://classiques.uqac.ca/classiques/Alain/Alain.html). Alain pense qu’il y a des intelligences différenciées. Il était enseignant dans le système des classes préparatoires aux grandes écoles, son métier de philosophe républicain fonctionnaire consistait de ce fait, si l’on voulait dire les choses brutalement, à identifier puis à former les individus aptes par leurs talents à être des cadres pour la nation au service de la République. La question qu’il pose revient aussi à trouver le régime de publicité le plus adéquat : comment publiciser sans tomber dans la démagogie ? La réponse à cette question passe par la volonté d’assurer la présence de l’ensemble des citoyens comme instance critique de mais aussi au sein de l’État. Il faut rendre l’État conforme à la volonté des citoyens et transformer l’élite en hommes sages (cela rappelle, explicitement revendiquée par Alain, la thèse platonicienne des philosophes-rois) ; une telle vue relève aussi de la tentative kantienne, précédemment évoquée. Il y a une visée morale de l’action politique.
No hay comentarios:
Publicar un comentario